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La résolution, une affaire de distance

Apple est connu pour ses campagnes d’affichages géants de photos prises à l’iPhone. Comme les affiches sont présentées de loin, les images donnent l’illusion d’une très bonne netteté. Prise de vue avec un iPhone SE.

Notre perception des détails d’une image varie avec la distance d’observation. Un tirage conçu pour être observé à 1 mètre de distance peut se contenter d’une résolution inférieure à celle d’un tirage examiné à 30 cm.

Faisons l’expérience suivante. Observons de près une gravure ancienne. Elle est formée d’une multitude de fines hachures. Elles simulent les demi-teintes. Quand on s’éloigne progressivement de l’œuvre, l’œil confond les traits à partir d’une certaine distance. Ils se transforment en gris. Les tons discontinus deviennent continus. Ce phénomène de perception altérée par la distance d’observation provient des limites de l’acuité visuelle d’un être humain.

Acuité visuelle

Un enfant doté d’une vision normale peut voir un objet avec netteté à 10 cm. Chez le jeune adulte, il faut compter 25 cm. À partir de 40 ans, la presbytie allonge peu à peu ce punctum proximum, la distance minimale de vision nette.

Revenons aux hachures des gravures. Imaginons une succession de traits noir et blanc de même épaisseur. Si celle-ci est de 0,5 mm, chaque paire comprenant une ligne blanche et une ligne noire mesure le double de l’épaisseur d’une ligne, soit 1 mm. On a donc une paire de lignes par millimètre (pl/mm). Si l’épaisseur des lignes est réduite à 0,25 mm, on atteint 2 pl/mm, à 0,125 mm on passe à 4 pl/mm, et ainsi de suite.

À 25 cm de distance, un jeune adulte peine à distinguer les lignes d’un motif d’une résolution de 7 pl/mm. À 50 cm, on en différencie au mieux la moitié. On tombe à 3,5 pl/mm. À 1 m, passe au quart, soit 1,75 pl/mm, etc.

Malgré une bonne vue, si vous observez ce motif de traits blancs et noirs au-delà d’une distance de 2 m, cet ensemble de lignes parallèles se transforme en gris uniforme. Sa résolution est de 1 pl/mm. Ce phénomène normal provient des caractéristiques de notre acuité visuelle.

Des lignes au pixels

Passons de la ligne au pixel. Le pixel (de l’anglais picture element) est le plus petit élément d’une photographie numérique. La ligne la plus étroite d’une image a donc un pixel de large. On peut convertir 1 pl/mm en pixels/mm : on obtient 2 pixels/mm (un pixel noir et un pixel blanc). 7 pl/mm correspondent à 14 pixels/mm, soit 355,6 pixels par pouce (ppp). Arrondissons à 360 ppp. C’est la résolution native de la plupart des imprimantes Epson. On n’a guère besoin d’aller au-delà, car l’oeil ne verrait pas la différence. Canon et HP utilisent une résolution native de 300 ppp (l’équivalent à 6 pl/mm, soit 304,8 ppp).

Si vous souhaitez connaître la résolution optimale en ppp d’une image en fonction de la distance d’observation, voici une formule assez simple à intégrer dans un tableur : Résolution utile = (1/(Distance*0,3))*25,4. La distance est en mètre. La formule correspond à une résolution de base de 6,66 pl/mm à 25 cm.

Ce tableau est établi à partir d’une résolution de 7 pl/mm pour 25 cm, soit 356 pixels ou points par pouce (ppp). C’est la limite de l’acuité visuelle de l’œil humain d’un jeune adulte. Plus on s’éloigne du tirage, plus la capacité de différenciation des pl/mm ou des ppp baisse.
La résolution généralement recommandée pour obtenir un tirage net et détaillé est de 300 ppp. Cela correspond à l’acuité de l’œil humain pour un objet situé à une trentaine de centimètres. L’image de 12 MP provenant d’un iPhone délivre un tirage de 25,6 x 34,14 cm à 300 ppp.

Résolution et image numérique

Une image n’est pas composée de lignes blanches et noires, mais de modulations de pixels d’intensité lumineuse variable. Une photographie montre très rarement des motifs correspondant exactement à des paires de lignes d’une résolution de 6 ou 7 pl/mm. Par ailleurs, un tirage est peu souvent observé d’aussi près. L’usage est plutôt de tenir l’œil à une distance correspondant à la diagonale d’un tirage. Celle-ci est de 36 cm pour une feuille A4 et de 51 cm pour un A3. Ce qui nous permet de descendre respectivement à 235 et 166 ppp en utilisant notre formule. Un autre facteur est à prendre en compte dans la perception de la netteté d’un tirage.

Les JPEG enregistrés par les smartphones et par nombre d’appareils à capteur 24×36 ou APS-C affichent une résolution par défaut de 72 ppp. Les 12 MP du même iPhone délivrent alors une taille d’image de 106,68 x 142,24 cm. Observée à 1,5 m, l’image semblera parfaitement nette.
Un labo professionnel comme Picto (www.pictoonline.fr) considère que “les informations contenues dans votre fichier sont suffisantes et raisonnables pour un tirage de qualité” avec une résolution de 125 ppp (agrandissement de facteur 2,40 par rapport à 300 ppp) . En fonction de critères personnels sur la netteté apparente de l’image, des caractéristiques de chaque fichier à tirer, on modulera la limite basse de la résolution pour la rendre acceptable. Ici, une image de 16 MP (4928 x 3280 pixels) délivre un tirage de 100,14 x 66,65 cm à 125 ppp, lequel paraîtra net et détaillé à 60 cm de distance.
L’œil à gauche est un recadrage d’un portrait effectué à 1 m avec un Nikon D600 (24 MP). L’image fait 3,5 x 5 cm à 300 ppp. À droite, le portrait est effectué à environ 2 m de distance. Un recadrage équivalent donne une image de 127 ppp pour 3,5 x 5 cm. Elle est rééchantillonnée à 300 ppp dans Photoshop pour la positionner à côté de la première image. En observant la page à 80 cm de distance, la différence est infime entre les deux yeux.

Résolution et tirage

Pour restituer un rendu photographique, avec des dégradés nuancés sans trame visible, une imprimante jet d’encre délivre des tons continus avec plus de 1000 points d’encre par pouce (exprimés le plus souvent en dpi, dot per inch en anglais). Chez Canon, les pilotes d’impression proposent 1200 ou 2400 dpi. C’est 1440 ou 2880 dpi, voire 5760 dpi pour de nombreuses Epson jusqu’au format A2. La résolution de l’imprimante est donc différente de celle de l’image que l’imprimante reçoit. Et elle ne prend pas en compte les mêmes unités. Dans le cas de l’imprimante, il s’agit des points d’encre formés par des gouttelettes de quelques picolitres. Dans le cas d’une image, il s’agit de pixels.

Pour finir, il faut savoir qu’avec un fichier de résolution inférieure à la résolution native de l’imprimante, il est systématiquement rééchantillonné. A 300 ppp pour une imprimante Canon ou 360 ppp pour une Epson. Ce rééchantillonnage évite tout risque de pixellisation ou de trame visible sur l’image imprimée.

La résolution d’une imprimante est différente de celle de l’image que l’imprimante reçoit. Dans le cas de l’imprimante, il s’agit des points d’encre formés par des gouttelettes de quelques picolitres. Dans le cas d’une image, il s’agit de pixels.

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Texte et photos : Philippe Bachelier, professeur de Techniques d’impression à Spéos

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