Un labo dans un placard
L’argentique rencontre un regain d’intérêt. Mais dans un petit logement, installer un labo est un challenge. Agrandisseur et cuvettes prennent de la place. Bonne nouvelle, ils peuvent aussi bien se ranger qu’être utilisés dans un placard.

Le labo se cache derrière les deux portes coulissantes du placard, dans un espace réduit de moins de 1 m3. L’éclairage inactinique y est intégré.
Installer un labo chez soi est le rêve de tout amateur de photographie argentique. Mais le principal frein est le manque de place. Car le coût du matériel reste abordable. Depuis les débuts de l’argentique, toutes sortes de lieux et de recoins ont été investis par les photographes ne pouvant s’offrir le luxe d’un local permanent : cabinet de toilettes, salle de bains, cuisine, cave ou grenier. Le livre The Darkroom Handbook (Focal Press, 1997) montre toutes sortes d’astuces pour installer un labo dans des endroits auxquels on ne pense pas de prime abord. Notamment, pourquoi pas un placard ?
The Darkroom Handbook
Un livre riche d’idées pour configurer son labo dans toutes les pièces de son logement. Rédigé en anglais, mais richement illustré, il peut être consulté sur archive.org (entrer la recherche avec les mots darkroom handbook). Les labos de photographes reconnus comme Harry Callahan, Aaron Siskind, Berenice Abbott, et W. Eugene Smith sont dévoilés.
Espace mini
Une penderie à portes coulissantes, bien qu’exigüe, est une bonne candidate. Sa profondeur est de 46 cm une fois les portes fermées. Sa largeur : 106 cm. Sa hauteur disponible : 165 cm. Le placard est d’une certaine façon idéalement situé, dans une pièce où la lumière du jour ne peut pénétrer, pas plus que la lumière électrique provenant d’autres pièces. Si le placard est dans une pièce possédant une fenêtre, il est nécessaire de la rendre étanche à la lumière. Du tissu noir ou une bâche de plastique noir et de l’adhésif feront l’affaire.
La profondeur du placard conditionne la taille de l’agrandisseur, notamment celle de son plateau. Ici, le Leitz Focomat IC doit être installé de côté. Un Leitz Valoy pourrait tenir de face avec son plateau.
L’agrandisseur, le plus gros morceau
L’outil le plus encombrant est l’agrandisseur. Un plateau mesure souvent plus de 50 cm de long, à l’instar des modèles Kaiser. Celui d’un Leitz Focomat IC, qu’on peut se procurer en occasion, conçu pour le 24×36, est de 55 cm de profondeur, mais de 40 cm de large. De côté, il tient sans rendre le tirage trop compliqué (et c’est bien pour les négatifs dont l’orientation est un portrait). Les colonnes des agrandisseurs étant toujours amovibles, un plateau sur mesure adapté à l’espace disponible est envisageable. Un Leitz Valoy, lui aussi fabriqué pour le 24×36, qui fut très prisé en son temps par W. Eugene Smith possède une base de 39 x 45 cm. Pour des formats de film jusqu’au 4×5, l’Intrepid est compact et peut se visser sur tout type de colonne, laquelle peut à son tour être fixée sur un plateau aux dimensions personnalisées.
Les accessoires de l’agrandisseur
Le margeur doit s’adapter à l’espace. Tog, LPL, il s’en trouve de nombreux modèles en occasion à deux lames. En neuf, un 24 x 30 cm est proposé par Kaiser. De même, les dimensions d’une tireuse de planche contact de type Paterson conviennent. Le compte-pose est fixé au mur, l’idéal étant un modèle acceptant une pédale. Un vérificateur de mise au point complète l’ensemble. L’agrandisseur étant près du mur, la surface blanche crée des réflexions parasites. Peindre les parois en noir ou coller du papier élimine le problème.
Minuterie de labo
Grâce à une application comme Darkroom Clock (iPhone) ou Darkroom Lab Timer (iPhone et Android), un smartphone fait office de minuterie en lumière inactinique.
Lumière rouge et boîtes de papier
Fixé sous l’étagère supérieure, l’éclairage inactinique à LED Heiland permet de passer de la lumière rouge à une lumière blanche à 5000 K. Sous l’agrandisseur, une boîte à papier photo en plastique ou ABS noir de type Papersafe Doran ou Arkay facilite la prise du papier : on y conserve les feuilles sans la protection de l’enveloppe de plastique noir de l’emballage d’origine. L’étagère inférieure reçoit les éprouvettes, les produits chimiques, le matériel de développement des films. Développer des films se fait plus facilement dans une salle de bains, l’enroulement sur une spire pouvant être réalisé avec un manchon de chargement.
Organiser les cuvettes
À défaut d’un plan de travail pour placer à l’horizontale les quatre cuvettes de révélateur, de bain d’arrêt, de fixateur et de rinçage, une disposition verticale est possible. Le révélateur est posé sur une étagère à 120-130 cm du sol. Des écarts de 15 à 20 centimètres entre les cuvettes inférieures, ainsi qu’un décalage dans leur positionnement en profondeur (la cuvette de révélateur est placée plus au fond, celle du rinçage au plus proche de soi) permet de glisser facilement le tirage du révélateur vers le bain d’arrêt puis vers les autres cuvettes. Le lavage est effectué dans la salle de bains. Celui des papiers RC ne dure que quelques minutes. Le séchage se fait en tendant une corde à linge et en y accrochant les tirages avec des pinces.
L’ordre des cuvettes est important pour éviter la contamination des bains. Le révélateur est placé au-dessus du bain d’arrêt. 15 à 20 cm d’espace entre les étagères facilite l’introduction du papier dans la cuvette inférieure.
Sous le bain d’arrêt est placé le fixateur. Plus bas, une cuvette de rinçage intermédiaire précède le lavage. Un décalage progressif entre les cuvettes supérieures et inférieures permet de faire tomber les gouttes de produit dans la cuvette du dessous pendant le passage du tirage d’un bain à l’autre.
À moins d’installer un petit évier dans le placard, la solution la plus simple pour le lavage des tirages reste la salle de bains ou la cuisine. Le lavage des papiers RC ne dure que quelques minutes. Le séchage peut se faire dans toute pièce du logement, en tendant une corde à linge et en y accrochant les tirages.
Processeur à faible encombrement pour papier
Novadarkroom fabriquait des processeurs verticaux constitués de trois ou quatre compartiments pour les produits chimiques. Ils n’occupent qu’une faible place sur un plan de travail. On peut en dénicher d’occasion. Ils sont remplacés par les systèmes d’Optima Darkroom.
Quelques adresses où trouver le matériel de labo :
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Texte et photos : Philippe Bachelier, professeur de Techniques d’impression à Spéos